Au moins 70 habitants belges ont demandé d’aller combattre en Ukraine, mais ont-ils le droit de le faire ?
Plus de 70 résidents de Belgique ont déjà exprimé leur volonté de rejoindre la ligne de front en Ukraine pour y combattre les troupes russes au sein de la dénommée "légion internationale". Mais ont-ils le droit de le faire ? Et quelles conséquences risquent-ils ? Marten Zwanenburg, professeur de droit militaire, livre quelques éléments de réponse au micro de la VRT.
Le week-end dernier, l'ambassade d’Ukraine en Belgique a diffusé un message sur Facebook, notamment, pour appeler à collecter du matériel médical, mais aussi à s'engager dans la Légion étrangère demandée par le président ukrainien Zelenski.
Depuis lundi, quelque 70 personnes se sont présentées à l'ambassade à Bruxelles. Tous sont des hommes, de nationalité belge mais aussi italienne, française, marocaine ou encore luxembourgeoise. Certains d’entre eux devraient déjà partir pour l’Ukraine ces prochains jours, malgré l'avis du SPF Affaires étrangères qui déconseille fortement de s’y rendre pour quelque raison que ce soit.
Ces hommes ont-ils le droit d’aller se battre à l’étranger ?
Selon Marten Zwanenburg, professeur de droit militaire à Université d'Amsterdam, il n'existe pas de véritable cadre légal. "Il y a bien la loi sur la neutralité", explique-t-il dans l’émission 'De wereld vandaag' sur Radio 1 (Radio 1).
"Cela signifie que les États neutres ne doivent pas ou ne peuvent pas empêcher les combattants de partir pour un conflit. Il existe toutefois une exception : les Belges qui font partie de notre armée ne sont pas autorisés à partir volontairement. Il est également important de souligner que la Belgique elle-même ne peut pas recruter et envoyer des citoyens ordinaires."
"En tant que Belge, vous pouvez donc simplement aller vous battre à l'étranger", affirme Marten Zwanenburg.
Quelles conséquences risquent-ils ?
"Le droit humanitaire de la guerre fait une distinction entre deux voies. D’une part, vous pouvez rejoindre les forces armées étrangères, ou un corps de volontaire répondant à des exigences spécifiques. Un tel corps doit, par exemple, être commandé par quelqu'un qui est responsable devant l'État, avoir un système martial, et faire une distinction claire avec les civils. Dans ce cas, ce corps fait partie des forces armées", explique-t-il.
"Si vous vous engagez, vous bénéficiez de ce que l'on appelle l'immunité du combattant. Cela signifie que vous pouvez effectuer des actes de guerre sans être jugé. Vous ne pouvez alors être poursuivi que pour des crimes de guerre."
En principe, vous commettez un meurtre si vous tuez quelqu'un à l'étranger en tant que civil.
"D'un autre côté, vous pouvez aussi partir de votre propre chef, en tant que civil. Dans ce cas, vous n'avez pas ce privilège et vous pouvez être poursuivi pour avoir pris les armes. En principe, vous commettez un meurtre si vous tuez quelqu'un à l'étranger en tant que citoyen, mais dans la pratique, il faut qu'il y ait suffisamment de preuves pour être réellement puni."
"Une autre différence pourrait se présenter si vous êtes capturé par les troupes russes", poursuit le professeur de l’Université d’Amsterdam. "Si vous faites partie des forces armées ukrainiennes, vous êtes officiellement un prisonnier de guerre. Vous devez alors être libéré après le conflit. Si vous n’en faites pas partie, vous tombez sous le coup de la loi russe et risquez de vous retrouver dans une cellule russe pour une longue période".
Quelle différence avec les combattants syriens ?
Récemment, de nombreux Belges partis combattre en Syrie ont été poursuivis. Mais leur cas n’est pas pour autant comparable. "Ces personnes ne se battaient pas pour une force armée étatique, donc en tout état de cause, elles n'étaient pas protégées par l'immunité du combattant", souligne Marten Zwanenburg. "Par ailleurs, et c’est d’autant plus important, l'EI est un groupe terroriste. En Belgique, il est de toute façon interdit de le rejoindre."
Ecoutez ci-dessous les explications de Vladyslava Litiaga (deuxième secrétaire de l'ambassade d'Ukraine à Bruxelles) :
