Ivan De Vadder : "Les menaces visant des personnalités politiques explosent, c'est inquiétant"
Le week-end dernier, le président de Vooruit Conner Rousseau présentait les vœux de son parti dans sa ville de Sint-Niklaas (Flandre orientale) et il y a eu un incident. Un homme un peu trop enthousiaste s’est approché de lui et a été emmené par des policiers en civil. On s’est alors rendu compte que Conner Rousseau bénéficiait d’une protection rapprochée, apparemment parce qu’il a reçu des menaces. Une lettre, parvenue à la rédaction du quotidien Het Laatste Nieuws annonçait "que la dernière heure de Conner Rousseau est arrivée". Il rejoint ainsi la liste toujours plus longue de ses collègues mis sous protection policière après avoir reçu des menaces. Ecoutez, ci-dessous, l'analyse du journaliste politique de la VRT Ivan De Vadder.
Conner Rousseau n'est pas le seul politicien a avoir reçu des menaces en Belgique. En réalité la liste est longue, après Bart De Wever, le président de la N-VA et bourgmestre d'Anvers, après Annelies Verlinden (CD&V) la ministre de l'Intérieur, Zuhal Demir (N-VA) la ministre flamande de l'Environnement, et Vincent Van Quickenborne (Open VLD) le ministre de la Justice, et d'autres encore.
En ce qui concerne le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne, qui a déjà dû se réfugier à deux reprises avec sa famille dans une "safe house", la source des menaces est facile à identifier. Il s'agit de la mafia liée au trafic de drogue. Quant à Conner Rousseau, il estime que les menaces à son encontre proviennent des milieux d'extrême droite. Il se réfère pour cela à de nombreux messages de haine reçus sur les réseaux sociaux.
Dans l'émission dominicale "De zevende dag", Conner Rousseau évoquait l'annulation du festival d’extrême droite “Frontnacht” qui devait avoir lieu fin août à Ypres. Le jeune président de Vooruit avait annoncé à l'époque que son parti quitterait la coalition communale, conclue avec l’Open VLD et la N-VA à Ypres, si le festival avait lieu.
Ces menaces doivent être prises au sérieux
Il est certain que le phénomène des menaces doit être pris au sérieux. Il y a eu l'incident de dimanche à Sint-Niklaas, il y a eu l'homme qui s'est présenté au domicile d'Annelies Verlinden soit-disant pour "postuler pour un emploi", et il y a eu la fuite de Vincent Van Quickenborne avec sa famille dans une safe house.
Ce phénomène n'est cependant pas propre à la Belgique. On en a peu parlé lors de l'annonce de la démission de la Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern, mais l'année dernière la police néo-zélandaise a signalé que les menaces à l'encontre la Première ministre avaient presque triplé en trois ans.
En France, un sondage publié le 8 décembre 2021 sur le site de France Bleu, dans lequel 10.320 Français étaient interrogés, révèle que près d’un Français sur deux déclare soutenir ou comprendre les personnes qui interpellent les élus par des mots grossiers. 28 % d'entre eux comprennent quand les élus sont menacés, et un quart d'entre eux n'ont aucun problème avec les agressions physiques envers les politiciens.
Critique de la gouvernance de la Flandre par la N-VA
Dans son discours à la réception de Nouvel An de son parti, Conner Rousseau a vivement critiqué la politique de N-VA menée au gouvernement flamand. Rousseau a dénoncé le fait que "le parti qui avait pris notre pays en otage pendant 20 ans pour plus de compétences pour la Flandre", dès qu'il a obtenu ces compétences, "les a détruites une par une".
Rousseau a cité les domaines de l'enseignement, de la garde d'enfants, des maisons de repos et des transports en commun. Et il s'est adressé personnellement au ministre président Jan Jambon en disant : "Eh bien, Monsieur Jambon, vous devriez vraiment avoir honte. Vous êtes plus intéressé par la destruction de la Belgique que par le renforcement de la Flandre."
Ceux qui pensaient que la collaboration entre la N-VA et le Vooruit était finalisée depuis longtemps - et c'est ce qui a été reproché il y a deux semaines lors des réceptions de Nouvel An du Vlaams Belang et du PVDA - doivent noter qu'à l'approche des élections, le Vooruit se présentera, au niveau flamand du moins, comme un parti d'opposition. En effet, une "fraternisation" entre le Vooruit et la N-VA ne serait pas un bon slogan de campagne pour les socialistes flamands.
La VRT doit utiliser le néerlandais standard dans sa série sur l'histoire de la Flandre
L’ancien ministre président flamand et actuel parlementaire européen Geert Bourgeois (N-VA) s’en est pris à la VRT pour la langue utilisée par l’animateur Tom Waes dans la série télévisée "Het Verhaal van Vlaanderen", diffusée le dimanche soir.
Geert Bourgeois estime que Tom Waes parle une "tussentaal" (une langue intermédiaire entre le dialecte et le néerlandais standard). Ce qui n’est pas approprié pour une chaîne publique, estime le parlementaire européen. Ivan De Vadder donne raison à Geert Bourgeois mais ajoute que cette "tussentaal" est utilisée par une majorité de la population, y compris au Parlement flamand.
Et de citer, pour terminer, son collègue le journaliste Alain Gerlache qui dans les colonnes du journal De Morgen se demande quelle langue les Wallons et les Bruxellois doivent apprendre aujourd’hui pour se débrouiller en Flandre, puisque la langue qu'ils entendent dans les séries télévisées et dans la rue n'est pas le néerlandais standard qu'ils ont appris à l'école.
Ecoutez ici l'interview d'Ivan De Vadder en français
