La Chambre suspend les indemnités de retraite d'anciens présidents et hauts fonctionnaires
Le Bureau de la Chambre a décidé mercredi de suspendre le versement d'indemnités de retraite à certains de ses hauts fonctionnaires et anciens présidents. Selon deux analyses juridiques demandées par la présidente, Eliane Tillieux (PS), un régime mis en place en 1998 serait contraire à la loi.
Vraisemblablement pour contourner la loi Wijninckx qui plafonne le montant des pensions dans la fonction publique, le collège des questeurs de la Chambre a permis que les fonctionnaires dirigeants de celle-ci (greffier, greffier adjoint et directeur de la questure) touchent une indemnité correspondant à la différence entre le plafond Wijninckx et la pension due sans ce plafond.
La période durant laquelle cette indemnité était versée correspondait à la durée de la fonction dirigeante jusqu'en 2003, année où il a été décidé de... la doubler. Les anciens présidents avaient également droit à une indemnité en plus de leur indemnité de sortie en tant que parlementaire, calculée sur la base du sursalaire versé pour la fonction de président et la durée du mandat. Plusieurs conditions devaient être réunies: avoir plus de 60 ans, ne plus siéger dans une assemblée et ne pas exercer une fonction qui serait contraire au versement de ladite indemnité.
Une analyse juridique commandée par Eliane Tillieux
L'actuelle présidente de la Chambre a découvert l'existence de ces régimes il y a peu à la faveur de l'analyse réalisée par un des fonctionnaires de l'assemblée sur les différents régimes de pension applicables. Quelques semaines de travail ont été nécessaires pour mettre à jour le système. Mme Tillieux a commandé successivement deux analyses juridiques pour s'assurer des problèmes légaux posés par lesdits systèmes et, à titre conservatoire, a suspendu le versement des indemnités.
Mercredi, le Bureau de la Chambre a validé la suspension et abrogé le régime en vigueur pour les hauts fonctionnaires. Une nouvelle analyse est en cours pour le mécanisme concernant les présidents ainsi qu'une autre analyse sur la possibilité de retirer les décisions prises il y a plus de 20 ans.
"Dès que j'ai eu connaissance de ces dispositifs, j'ai consulté des experts pour en vérifier la légalité et dès que l'illégalité a été confirmée, j'ai pris des mesures à titre conservatoire", souligne Mme Tillieux.
"Il s’agit de beaucoup d’argent"
"Je suis triste pour l'institution", ajoute-t-elle, sans préciser les personnes concernées et les montants en jeu. Il s'agit de "beaucoup d'argent". Elle a décidé à titre personnel de renoncer à son indemnité. "Par rapport à ce que vivent les gens aujourd'hui, cela me paraît totalement inadmissible".
À bonne source, l'on indiquait que huit anciens hauts fonctionnaires bénéficieraient encore du régime et deux anciens présidents: Herman De Croo (Open Vld) et Siegfried Bracke (N-VA).
"Je n'étais pas au courant que cette règle qui existe depuis des dizaines d'années ne satisfait (pas) à la loi Wijninckx. Je la ferai examiner d'un point de vue juridique. Je suis par contre étonné que tout cela n'ait pas été remarqué malgré les contrôles de la Cour des comptes et la Chambre elle-même. S'il apparaît que cette pratique ne correspond pas aux règles, je veillerai à me mettre en ordre", a souligné Herman De Croo dans une réaction adressée à l'Agence Belga.
Dans la majorité, le chef de groupe Ecolo-Groen, Gilles Vanden Burre, a réclamé "une transparence totale sur ces bonus de pension", estimant que ceux-ci devaient être récupérés. À ses yeux, ce dossier montre l'urgence d'accélérer le processus de renouveau politique lancé à la Chambre et aujourd'hui enlisé.
Dans l'opposition, la N-VA a également exigé l'arrêt de ces régimes et que la lumière soit faite sur leur mise en place. Le PTB a dénoncé une culture des "privilèges politiques" qui, pour les deux anciens présidents de la Chambre, représenterait des suppléments de 3.000 à 5.000 euros bruts par mois. "Ces allocations doivent être supprimées et remboursées immédiatement", a demandé le député Raoul Hedebouw.